CES ATTENTES QUI CRÉENT DES DÉCEPTIONS

J’aimerais vous parler des attentes que l’on se crée nous-même, dans notre tête et dans notre cœur. La plupart du temps cela se passe sans que l’on s’en rendre compte, on prend pour acquis qu’après la discussion que l’on a eu avec un proche, les choses sont claires pour tous et que la situation se déroulera comme on le prévoit. Après avoir rendu service à un ami, on espère en secret recevoir un peu de gratitude en échange. Dans ces exemples, vous remarquerez que les attentes viennent de nos désirs, nos envies ou de ce que l’on aimerait voir et/ou entendre. On s’attend à un certain résultat, mais malheureusement il arrive que l’on ait mal évalué la situation ou qu’un imprévu nous empêche d’atteindre notre but, c’est alors que nous ressentons de la déception et même parfois de la colère vis-à-vis l’autre qui a «trahi» nos attentes. En effet, la déception survient lorsqu’il y a un décalage entre les attentes fixées et la réalité. Si cette attente s’est construite sur une valeur importante pour nous, la déception ressentie sera alors plus grande et nous demandera des efforts importants pour accepter la réalité et revoir notre position.

Pourquoi on se crée des attentes ?

Je pense que nos attentes visent à combler notre besoin de sécurité. On veut contrôler notre vie, que les choses se passent à notre façon. Par exemple, je m’attends à ce que mon fils qui a reçu un diagnostic de maladie mentale, continue de prendre sa médication et qu’il maintienne une saine routine de vie car je désire qu’il conserve son emploi et qu’il soit en santé. Cette attente répond à mon besoin de prendre soin de lui et de prévenir des problèmes qui auraient un impact sur toute la famille. Comme la santé est une valeur importante pour moi, si cette attente n’est pas rencontrée, ma déception sera très grande et je me sentirai peut-être coupable de ne pas avoir tout fait pour prévenir cette situation.
Si je souhaite avoir des attentes réalistes, il est nécessaire de m’interroger sur les croyances, les valeurs et les besoins réels qui se cachent derrière mes attentes. Pour développer une certaine habileté au bonheur, il nous faut ajuster nos attentes et accepter que parfois nous serons déçus car les choses se passeront différemment de notre scénario. Accepter ce cadeau qu’est la déception, c’est en réalité accepter de faire un travail sur soi. Au lieu de fuir ma déception et de blâmer l’autre, je me plonge dedans afin de comprendre pourquoi je me retrouve dans cette situation et comment l’éviter dans l’avenir (voir à quelle croyance ou fausse perception je m’accroche). La déception devient alors une variable d’ajustement de notre quotidien, au même titre que la joie qui nous indique que nous sommes sur le chemin qui nous convient.

Développer des attentes réalistes dans un contexte de maladie.

Afin d’avoir des attentes réalistes vis-à-vis de la personne malade, il est important de bien comprendre la maladie de notre proche, quels sont les symptômes, les manifestations et les traitements suggérés. Il faut aussi être en mesure de comprendre comment la maladie affecte notre proche, tant au niveau de ses capacités que de ses forces. Et comme la maladie évolue avec le temps, il est nécessaire de réévaluer régulièrement la situation afin de s’assurer de bien saisir sa réalité dans le moment présent. Il nous faut donc demeurer vigilant sur les espoirs que nous entretenons, les analyser toujours en nous demandant si ces attentes sont réalistes. Plus nos attentes seront réalistes, meilleur sera notre bien-être, et par le fait même, celui de notre entourage.

Pistes pour avoir moins d’attentes et avoir des attentes réalistes.
  • Il est important de se rappeler que les attentes seront toujours présentes dans nos vies et qu’elles traduisent nos désirs et nos besoins. Il est important de se questionner et de s’assurer que nos attentes soient réalistes, sinon nous risquons de nous épuiser et nous décourager. Soigner nos blessures (abandon, rejet, le manque de reconnaissance etc.) nous permet de mettre fin aux attentes irréalistes. Quand ce travail est fait avec amour, on ressent une grande libération, une renaissance.
  • Résistez à la tentation de se fixer des attentes nous permet de travailler à partir d’une feuille blanche, pas de faux espoirs, pas de conclusions irréalistes, pas d’attentes et pas de déceptions. Vous décidez de faire confiance à la vie en sachant qu’elle vous apportera ce qu’il y a de mieux au meilleur moment qu’il soit, même si ça ne semble pas toujours le cas.
  • Lorsque nous réalisons que notre attente n’est pas réaliste, il faut se donner le temps d’accepter cette situation. Nous accueillons nos sentiments et notre peine et nous nous laissons le temps de faire le deuil de cette peine. Soyons patient avec nous et acceptons que ce n’est qu’après plusieurs tentatives que nous serons en mesure d’ajuster plus rapidement nos attentes à la réalité.
  • Pour se fixer des attentes réalistes, il est important de connaître les capacités et les limites du proche, mais il faut aussi identifier ses propres capacités et ses limites et ne pas hésiter à demander de l’aide pour nous soutenir si nous en ressentons le besoin.

« Chacun, de part et d’autre de la maladie, fait l’expérience de la perte et du renoncement. Dans un éclair de lucidité, vous regardez l’écart se creuser entre ce qui est aujourd’hui et ce qui était autrefois, dans le passé encore si proche et vous entrevoyez ce qui aurait pu être et ce qui ne sera peut-être jamais. »
Dr. Christophe Fauré, psychiatre

Avec bienveillance, Joanne